Il y a des maisons qui ne s’annoncent pas. Elles ne surgissent pas au détour d’un communiqué, ne s’imposent pas dans l’urgence. Elles avancent à pas lents, comme si elles cherchaient d’abord à se faire accepter par le lieu, à s’accorder à ce qui les entoure.
À Colmar, l’une de ces maisons est en train de prendre forme. Invisible ou presque, elle s’élève derrière des arbres anciens, entre les murs d’une villa à l’histoire longue, et les pierres d’un jardin longtemps laissé en paix. Elle ne s’est pas encore ouverte, mais déjà, elle commence à habiter l’esprit de ceux qui passent à proximité.
Boulevard Saint-Pierre, certains s’arrêtent pour observer le chantier, intrigués par les matériaux soigneusement choisis, par la façon dont on semble restaurer sans brusquer. Rue Berthe Molly, on parle à voix basse d’un lieu nouveau, d’un projet discret. Des enfants ont remarqué les bâches illustrées. Un batelier a raconté, en souriant, que l’embarcadère allait bientôt retrouver une âme.
Ce lieu en devenir est encore mystérieux, il s’exprime autrement. Par les gestes de ceux qui y travaillent : les mains d’un tailleur de pierre, la concentration d’un ébéniste sur une moulure d’époque, le regard attentif d’un architecte sur une verrière ancienne qu’on hésite à remplacer. Chaque jour, une trace est laissée, un choix est posé, un lien est créé.
Et puis il y a les signes visibles, à peine soulignés : une illustration sur une palissade, quelques mots-clés soufflés à l’encre, un nom qui circule de bouche à oreille – La Villa COSE – comme une promesse douce.
Ce moment suspendu, entre chantier et révélation, est précieux. Il ne dure jamais longtemps. Il précède l’ouverture, mais il est déjà l’entrée dans une forme d’expérience. Une maison n’est pas seulement un lieu qu’on découvre : c’est aussi un état d’esprit que l’on partage, avant même d’y avoir mis les pieds.
En racontant ce temps d’avant, ce magazine ne cherche pas à lever le voile, mais à accompagner l’attente. À la prolonger même, avec délicatesse. Car ce qui se trame ici n’est pas un simple projet hôtelier, mais l’invention d’une nouvelle forme d’hospitalité, enracinée dans le secret, dans la nature, dans une certaine idée de Colmar.
Un jour, la porte s’ouvrira. Mais en attendant, il faut laisser la maison se construire, pierre après pierre, regard après regard.